Ramadan et emploi

Infos pratiques - AVENIR SANTÉ MUTUELLE - 19/04/2022

L’entreprise est un lieu de vie sociale où les acteurs interagissent, partagent des idées, des opinions voire des confrontations, chacun étant porteur de son histoire, de sa culture et de son éducation. De plus en plus, les acteurs de l’entreprise sont confrontés à l’expression des convictions religieuses. Si ce sujet se règle habituellement par le dialogue et le bon sens, il suscite des interrogations croissantes.

En 2022, du samedi 2 avril au lundi 2 mai au soir, les fidèles qui pratiquent le ramadan, un des 5 piliers de l’islam ne peuvent ni manger ni boire, de l’aube au coucher du soleil. L’islam est considéré, en France comme la deuxième religion après le christianisme avec plus de 5 millions de fidèles. Plus de 70% d’entre eux respecteraient strictement le ramadan. Il n’existe aucune règle spécifique dans le code du travail qui traite de cet acte religieux, mais certaines dispositions peuvent s’appliquer au salarié pratiquant.

AVENIR SANTÉ MUTUELLE explore les bonnes pratiques dans les entreprises et tente d’en faire ressortir les principaux modes communs.

Ce que dit le fait religieux

Le Ramadan est un évènement important dans la vie de la communauté musulmane. Il est une promesse de pardon et la préservation de l’enfer. Mais il comporte aussi quelques règles à respecter.

Le jeûne doit être suivi selon un calendrier précis appelé calendrier lunaire, disponible pour chaque pays dans le monde.

Mais ne pas manger ni boire ne sont pas les seules recommandations à respecter. Les pratiquants doivent observer des règles comportementales très strictes et respecter certains interdits.

En effet, durant le jeûne du ramadan, le musulman se doit de ne pas dire de paroles obscènes ni d’élever la voix. Il doit « baisser le regard et garder sa chasteté », ne pas écouter de « musique vulgaire » de médisance ou de mots grossiers, ne pas faire de geste offensant…

Dans le monde du travail, ces préceptes peuvent entraîner des conséquences physiques et psychiques sur le comportement des travailleurs, c’est pourquoi il est important de connaître les règles qui s’appliquent dans les entreprises et de prendre connaissance des bonnes pratiques dans ce domaine.

Ce que dit la loi… et le bon sens

Les horaires de travail

Il n’y a aucune obligation, pour l’employeur, dans le code du travail, d’aménager les horaires d’un travailleur qui pratiquerait le ramadan.

Toutefois, un aménagement du temps de travail peut être négocié. (Décalage des temps de pause, journée sans pause déjeuner, journées plus courtes…).

Si l’organisation du travail le permet, l’employeur pourra accorder ces aménagements. Dans le cas contraire, il devra veiller à ce que son refus ne soit pas constitutif d’une discrimination.

Les travaux pénibles

Le jeûne ne constitue pas une impossibilité de travailler, selon la loi. Mais l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité physique et mentale de ses travailleurs. Il pourrait alors proposer un changement d’affectation pour éviter les travaux pénibles ou demandant beaucoup d’énergie, sans que cela ne constitue une sanction disciplinaire.

Si, d’autre part, le médecin du travail établit que le salarié en situation de jeûne n’est temporairement plus en capacité d’exécuter ses missions en toute sécurité, l’employeur aura le devoir de retirer le salarié de son poste, mais avec une modification possible de la rémunération, relative à la période non travaillée.

Les congés

Il n’est pas possible pour un employeur de refuser à un salarié des congés pour un motif religieux si cette période de congés est fixée par une convention. En cas d’absence d’un accord de ce type, c’est à l’employeur de fixer cette période.

L’employeur peut toutefois refuser une demande de congés de son salarié pour des raisons liées aux contraintes de l’entreprise, si plusieurs employés demandent, par exemple, à bénéficier, au même moment, de congés simultanés et que cela entraîne une désorganisation du travail, il pourra accepter la demande de congé d’un salarié et la refuser pour un autre, même si les deux demandes sont liées à la même pratique religieuse. Il se basera alors sur des principes de bon sens et de justice sociale, en fonction de la situation de famille ou encore de l’ancienneté par exemple.

Les repas d’affaires

Attention, un employeur peut obliger un salarié à participer à un repas d’affaires si, et seulement si, le repas d’affaires fait partie du travail pour lequel l’employé a été embauché, comme c’est le cas chez certains commerciaux. Mais s’il peut exiger sa présence, il ne peut l’obliger à consommer le repas. Présence à un repas et consommation sont deux aspects qu’il y a lieu de ne pas considérer au même niveau d’exigence.

Des ajustements possibles mais encadrés

Dans la pratique, les autorités religieuses peuvent accorder des dérogations de rupture du jeûne dans certains cas exceptionnels. La préservation de la vie passe, en effet, avant l’obligation du jeûne. Le droit musulman prévoit des dérogations pour faire face et sortir des situations difficiles. En cas de canicule par exemple, en cas de déshydratation d’une personne âgée, elle peut rompre le jeûne et le rattraper par la suite ; il peut être interdit aux enfants, aux femmes enceintes ou aux personnes malades, etc.

La liberté de religion

La liberté de religion est à la fois la liberté de croire ou de ne pas croire et de pratiquer ou pas une religion. Mais, si la liberté de croire est protégée par plusieurs textes de portée nationale ou internationale, la liberté de manifester cette croyance est très encadrée jusque, parfois, à être précisée dans le règlement intérieur des entreprises.

La laïcité

La laïcité est un concept qui prend ses sources dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Elle est précisée dans l’article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 qui indique : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances… ».

Les agents de l’État, par exemple, qui ne doivent appartenir à aucune obédience, doivent s’abstenir de toute manifestation religieuse. Le principe de laïcité implique pour la République de ne reconnaître aucun culte mais impose le respect de toutes les croyances.

L’entreprise privée n’est, elle, pas contrainte à ce devoir de neutralité et se doit de respecter la liberté de ses salariés, ainsi que de ses clients, de manifester leur religion, mais toujours dans les limites de la bonne organisation du travail. Dans tous les cas, public ou privée, l’obligation de non-discrimination s’impose à tout employeur.

Le principe de non-discrimination

Constitution du 4 octobre 1958 : « Nul ne peut être lésé dans son travail en raison de ses origines, de ses opinions ou de ses croyances ».

En France, les différences de traitement considérées comme discriminatoires sont interdites. Mais ce principe n’est pas immuable, car le code du travail accepte toutefois des différences de traitement, lorsque celles-ci peuvent être justifiées « lorsqu’elles répondent à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et pour autant que l’objectif soit légitime et l’exigence proportionnée ». Les situations dans lesquelles l’appartenance à une religion peut justifier une différence de traitement sont pourtant très limitées et diffèrent d’une entreprise à l’autre en fonction de son activité.

Le cadre spécifique en droit du travail

Comme le dit la loi : « Toute restriction doit être à la fois justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché. ». Bien entendu, la part de subjectivité que cette recommandation laisse apparaître a nourri une jurisprudence extrêmement abondante.

La loi du 8 août 2016 sur le travail donne un cadre juridique aux entreprises qui souhaitent intégrer la neutralité religieuse dans leur règlement intérieur.

Mais attention, l’inscription dans le règlement de la neutralité doit se faire à la condition que les critères dégagés antérieurement par la jurisprudence soient pris en compte.

Les conséquences du jeûne religieux

Ne pas manger ni boire du lever au coucher du soleil peut présenter des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, notamment lorsque les travaux sont pénibles ou réalisés dans des conditions difficiles. Il appartient à l’employeur de veiller à prévenir ces risques et à mettre les moyens en conséquence.

La déshydratation est le risque principal, en particulier en période de grande chaleur, mais aussi pour certains métiers qui travaillent au contact de la chaleur. Le ramadan est aussi une période de fête où les personnes dorment peu. La fatigue cumulée peut entraîner des baisses de vigilance et de concentration qui augmenteront les risques d’accidents au travail.

La communication des règles minimales à respecter pour assurer la propre santé et la sécurité des salariés est un incontournable. Réaliser une communication plus générale sur le problème de la déshydratation, en intégrant bien entendu les difficultés spécifiques au ramadan, peut amener d’eux-mêmes, les salariés dont vous ne sauriez pas qu’ils suivent un jeûne, à venir échanger sur leurs possibilités d’aménagement des conditions de travail. (Réduction des temps de pause, aménagement des heures de travail…).

On conseillera de boire beaucoup d’eau juste avant le lever du jour et de consommer des sucres lents (pâtes, riz, céréales, etc.).

Les moments de repos dans la journée devront se faire dans un lieu calme et frais.

Une réaffectation provisoire sur des postes moins exposés aux risques peut être envisagées si les conditions d’exploitation le permettent, travaux en intérieur plutôt qu’en extérieur, roulement en équipe pour limiter l’exposition, etc.

On essaiera de laisser le moins possible un collègue qui pratique le ramadan seul. Une surveillance permanente permet une réaction rapide en cas de malaise.

Conclusion

Le ramadan fait donc partie des pratiques religieuses de plus de 70% de la population des musulmans en France, et donc, potentiellement, de 7 salariés musulmans sur 10.

Au-delà des articles de loi et de la jurisprudence, AVENIR SANTÉ MUTUELLE pense que les règles de bon sens doivent s’appliquer pour permettre aux uns de vivre pleinement leurs traditions et leurs pratiques religieuses et aux autres de continuer à assurer la productivité de leurs entreprises dans de bonnes conditions. Les règlements intérieurs doivent être clairs et connus de tous. Et, pour le pas stigmatiser les uns ou les autres, la communication sur les risques liés à une pratique, quelle que soit la communauté qu’elle concerne (religieuse, LGBT, culturelle ou traditionnelle), cette communication devrait être généralisée à tous les salariés, chacun se sentant concerné en fonction de ses propres convictions.

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